Jeune et jolie photo-reporter du midi de la France, Nath-Sakura mène depuis plusieurs années une carrière de photographe fetish et sexy en marge.
Née à côté de Barcelone en 1973, elle a notamment fait l’objet d’expositions au MACBA, l’un des plus grands musées d’art contemporain d’Europe, et au musée national de la Marine pour lequel elle a réalisé une photographie sur bâche de 15 mètres de long pour célébrer l’anniversaire de la disparition de Vauban. Elle est aussi l’une des rares photographes à aborder le thème de l’identité sexuelle avec intelligence et sincérité.
La démarche artistique de Nath-Sakura trouble souvent, tant elle mélange sa propre expérience de femme transsexuelle et la beauté ambiguë des corps. Mais les barrières tombent vite, tant ses images s’imposent par leur puissance érotique et leur qualités artistiques.
Nath-Sakura a publié en 2008 un recueil intitulé « Pervy Obsessions » (éditions Ragage) qui marque un nouveau tournant dans l’art photographique érotique. Entre des tarots de Marseille revisités par une voyageuse égarée, à mi-chemin entre ésotérisme et glamour, des créatures étranges gainées de latex croisées dans des lieux improbables, et de simples portraits aux significations ambiguës.
Un autre recueil publié par le même éditeur : « Une femme, deux hommes, trois regards » sera dans les librairies en mai.
Qui est Nath-Sakura ?
Nath-Sakura est le nom d’artiste d’une jeune photographe du midi de la France.
Comment êtes vous venu à la photographie ? Et pourquoi le choix du fetish au début des années 2000 ?
Par bien des voies détournées. Je me destinais à la recherche. A 25 ans, j’avais mon doctorat de philosophie en poche, mais l’Université française n’a pas voulu de moi. Il m’a donc fallu me reconvertir, pour nourrir ma petite famille. Je suis ainsi devenue photo-reporter, dans des conditions étranges. C’est alors que j’ai découvert, dans l’image, et grâce à l’image, qu’on pouvait montrer ce qui n’existe pas, en l’habillant des atours de la réalité. C’est ainsi qu’est né mon désir d’image, justement pour me libérer du réel, que j’étais obligée d’illustrer dans mon travail de journaliste. Pour me libérer d’un réel oppressant tout court.
La découverte de l’imagerie fetish était plus ancienne, au moment de l’adolescence, alors que j’expérimentais mes premiers émois. La beauté d’un corps gainé de latex, le vertige d’une taille affinée jusqu’à l’ivresse par un corset, la splendeur d’une jambe galbée par de hauts talons me renversaient. Une façon d’aborder l’érotisme qui m’a guidée dans ma vie privée. Jusqu’à ce que je comprenne qu’en tant que photographe, ce type d’image allait dans le sens de la libération du réel dont je parlais plus haut.
Habillée de cette manière, nous sommes toutes des déesses. Bien éclairées et maquillées, dans des robes en latex brillants, nous sommes même plus que cela. C’est ce dont j’essaie de parler dans mes images. De la monstruosité qu’il y a à être sublime dans un monde peuplé d’êtres banals. Mais pour une fille comme moi, de plus d’1,80 m, il n’y a rien de surprenant…
J’ai lu dans l’interview d’alien café que vous préférez l’ombre à la lumière pourtant il y a de nombreuses photos de vous. Comment est Nath-Sakura modèle ?
Il y a très peu de photos qui me représentent. Et toutes celles que vous avez dû voir ne sont que des autoportraits. Je suis incapable de me laisser photographier, car je n’accepte pas mon image. Quant à être dans l’ombre, c’est simplement parce que c’est là que j’existe le mieux. D’abord parce que ça n’est pas moi qui suis intéressante, mais ce que j’essaie de créer du mieux que je peux. Ce qui compte c’est ce que nous faisons, pas ce que nous sommes.
Quant à être modèle, je ne le suis que pour moi-même. J’ai besoin, de loin en loin, de me photographier pour me mettre au clair sur les changements qui survenaient dans mon corps, de le voir évoluer, ce qui a donné la série que j’ai intitulée « état des travaux ». Des travaux qui continuent encore, le chantier n’étant évidemment pas, comme il se doit, livré dans les temps…
Votre identité sexuelle est à la source de votre création ? Expliquez nous pourquoi vous êtes « une fille de contrebande ? »
Disons que j’ai ressenti l’impérieuse nécessité, dans mon parcours personnel, d’exprimer en image la terrifiante révolution intérieure que je vivais. Pas pour « parler de moi ». Mais pour mettre du sens sur une expérience violemment déstabilisante pour l’esprit.
Celle de mourir et de renaître. Celle de changer de corps. Celle du rejet et de la fascination. Celle d’être quelqu’un d’autre pour être finalement soi. Je n’avais guère de mots à mettre sur ce que vivais, même si l’écriture est aussi mon job. Alors j’y ai mis des couleurs et de la lumière, grâce à l’aide des adorables modèles qui ont bien voulu se prêter au jeu.
Car je suis « fille de contrebande ». La contrebande n’existe que parce qu’il y a des frontières, des limites, des interdictions. J’ai choisi, pour survivre et être simplement moi-même, d’être une contrebandière. De me jouer des barrières, d’aller, malgré les périls, où ceux de ma naissance ne vont pas. D’être ce que les imbéciles appellent une « transsexuelle ».
Ce qui n’est rien d’autre, concrètement, qu’une femme.
Source : Mag Erotik et Nath sakura Interview
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